Montgardin est dans l'arrondissement de Gap, canton de la Bâtie-Neuve ; commune: 940 mètres d'altitude ; à 15 kilomètres de Gap ; superficie en hectares: 1,538 ; habitants: 255 habitants.
L'ouverture des États Généraux
5 mai 1789
Le territoire
Environ trois quarts de lieue de circonférence, trois hameaux aux environs du village: Les Forests, les Aroncis, les Massots et, de plus, la Plaine - actuellement le Sarruchet.
Habitants
Environ 240 personnes, tant grands que petits.
Le territoire
Point de médecin. On a recours à ceux de Chorges, distant d'une demi-lieue, ou de ceux de Gap pour ceux qui ont le moyen de les payer.
Accoucheuse
Il y a une femme qui sert d'accoucheuse, sans avoir jamais sorti pour apprendre.
Épidémies
Il y a longtemps qu'il n'y a pas eu de maladies épidémiques pour le monde du pays, et on ne pratique point l'inoculation de la petite vérole. Mais en 1784 et 1785 il y a eu dans cette communauté une épidémie pour les bestiaux, qui avaient presque tous péri ; ce qui a réduit presque tout le monde dans la dernière misère.
Maisons
Les maisons snt en pierres. Ce pays est dépourvu de bois ; la chaux est fort chère. Le plâtre, on le tire d'une lieue et demie; le sable à une demi-lieue est très mauvais. Les habitants ne peuvent subvenir à acheter des matériaux. Généralement, tous les murs sont en terre glaise et de peu de durée ; tous les toits sont de paille, n'ayant point de carrière dans le pays et les ardoises venant de six lieues et demie. Point de fabrique de tuiles. La toise de couvert coûte 10 livres.
Relief
Ce qui est sur la route est plat ; tout le reste est en coteaux, collines et ravins qui dégradent totalement le sol.
Cultures
Les blés, froment et méteil et quelque peu d'épeautre sont cultures de Montgardin; aucune autre. Le fruit, de peu de conséquence ; quelques pommes de terre et peu de chanvre.
Les foires et marchés
Les habitants sont obligés de vendre du blé au commencement de la récolte pour payer leurs tailles, et la plus grande partie des habitants sont obligés d'acheter pour vivre depuis la Noël. On porte sur le dos des juments ou bourriques. Aucune foire ni marché. Les marchés de Gap, d'Embrun et de Saint-Bonnet, éloignés de quatre à cinq lieues du village.
Nourriture
les récoltes donnent, année commune, 400 charges, sur quoi il faut lever les semences et la dîme, les taxes et cens dus au seigneur et ce qu'il perçoit dans les domaines. Il manque, année commune, à peu près la moitié pour la nourriture des habitants.
Bois
De jeunes pins que la grande quantité de neige a presque détruits, quelques véges (osiers) et buissons dans l'île, dont les habitants se servent pour leur chauffage et pour chauffer le four quand ils font cuire leur pain.
L'île
Une île, laquelle est continuellement engravée par le torrent de Saint-Pancrace, lequel sépare le terroir de la Bâtie-Neuve d'avec celui dudit Montgardin. Elle pourrait se garantir par la force des digues, de même qu'une grande partie de terrain taillable.
Rivière - arrosage
Aucune rivière, trois torrents qui font un dommage considérable. Le terrain est mauvais. Les eaux sont bonnes. Les terres qui sont à l'arrosage sont passables, mais l'eau est très rare dans le pays; une partie vient du terroir de la Bâtie-Neuve; l'eau de dessous du moulin du pays en arrose quelque peu. Il faudrait construire des canaux pour agrandir l'arrosage. La misère des habitants ne leur permet pas de faire cette construction.
Bétail
Très peu de bœufs pour la charrue, des juments et des bourriques aussi pour la charrue. Quelques habitants ont des moutons, en petit nombre, par le défaut de moyens et de fourrages.
Maréchaux et vétérinaires
Aucun dans l'endroit. On va à Chorges ou ailleurs pour le forgeage des outils de culture.
Commerce, industrie
Ni industrie ni commerce
Régime municipal
Aucun régime municipal
Revenus de la communauté
Environ 250 livres. La communauté doit 14,000 livres au seigneur du lieu, dont 6,000 livres dont elle paye l'intérêt à 2,5% et les autres 8,000 livres au 5%, sans déduction du 20°. En tout, elle paye au seigneur annuellement 665 livres 13 sols et 5 deniers, non compris les tasques et cens. Ils les rendent leurs comptes toutes les années, à la fin de la recette qui n'est guère finie qu'à la fin de trois ou quatre ans.
Aide aux pauvres
Aucune à l'exception de la 24° qui est peu de chose. Elle est distribuée en espèces par le curé et les officiers municipaux du lieu aux pauvres dudit lieu.
Derniers parcellaires
Le dernier parcellaire a été fait en l'année 1738. Il est en très mauvais état et il y a beaucoup d'erreurs. les papiers et titres de la communauté sont de peu de conséquence, tous les anciens papiers ayant été brûlés ou enlevés l'an des ennemis ; ils sont à la sacristie de l'église dans un coffre à trois serrures; chacun des consuls en a une et le secrétaire a l'autre.
Observations générales
Montgardin est situé à une distance de quatre lieues et demie d'Embrun et à trois lieues de Gap. Il est sur un coteau fort élevé. Les avenues sont très difficiles de part et d'autre. Ce n'est que rochers escarpés tout autour et exposés à tous les vents qui y font un dommage considérable, surtout aux couverts; quelquefois il les enlève en entier. Presque sans eau au gros de l'été et au gros de l'hiver surtout, faute de moyens pour y conduire une source assez suffisante pour l'utilité des habitants. Le manque d'eau est souvent la cause de la perte de leurs bestiaux.
La plaine de cette paroisse a le coup d'œil; il paraît des plus beaux à cause des prairies qui y sont; mais les habitants sont obligés de convenir de leur misère et mettre sous vos yeux, Messieurs, ce qu'il en est.
Montgardin est un pays qui est extrêmement chargé, tant pour les charges royales que pour les charges seigneuriales et intérêts qu'il est obligé de payer annuellement, et pour acheter du blé pour sa nourriture, attendu qu'il ne perçoit pas dans ses fonds de quoi vivre la moitié de l'année. Il a été et est obligé de vendre ses possessions, guère ses champs, il ne trouve pas qui les achète ; mais ses prés, non à des gens du lieu, mais à l'étranger. Cela se prouve par le désistement d'une partie des habitants, en sorte que presque tous les prés sont possédés par le seigneur ou par les étrangers, de même qu'une grande partie des autres fonds, et la meilleure, par le seigneur.
Ce manque de fourrage ôte l'engrais de ses terres. Sa misère se prouve encore par l'aliénation d'un bois, planté de hêtres ou fayards, qui est engagé au seigneur pour la somme de 395 livres, somme bien modique pour une communauté, et il n'est pas possible qu'elle puisse se la procurer pour le rachat de cette forêt.
On paye, dans le pays, la dîme en grains, à la cote 13°, en sorte qu'il faut payer la dîme des semences deux fois. En outre, les dîmiers désemencent la terre tous les treize ans.
Ce village est extrêmement ouvert et exposé aux vents, de sorte qu'il n'y a presque pas d'années où la grêle ne tombe dans le territoire ou à des quartiers. Les orages y sont fréquents.
Le terrain de ces village et hameaux est très ingrat. C'est une terre vague à demi-pied de profondeur et presque toute sur des rochers, et, à des quartiers, elle est forte; le dessous est amer et terre glaise et au moindre orage il se forme des ravins considérables ; ce qui fait des dégâts terribles, emporte les terres en pente et nite - couvre la terre de limon - une grande partie de la plaine. C'est un terrain sec, où le manque de pluie l'espace de huit jours, la récolte périt totalement.
Ces village et hameaux ont beaucoup de torrents qui y font un dommage très considérable. Le torrent de Saint-Pancrace, qui vient des montagnes de la Bâtie-Neuve et dérive dans le terroir dudit Montgardin, fait un dommage considérable. On pourrait le prévenir par des digues ; les habitants sont hors d'état de faire telles dépenses sans secours. D'une vérification faite par ordre de l'Intendant, l'année 1786, ce ruisseau avait emporté 28 charges de semence taillable et ce qu'il a emporté du depuis. Celui de Jouventy, qui part des montagnes de Chorges et de ladite Bâtie, fait aussi beaucoup de dommage. Celui de Combe-Chabert, qui part des montagnes de Chorges, d'Espinasses et d'une partie du terrain de Montgardin, fait aussi un mal très considérable à la plaine, le tout faute de secours.
Les habitants de ce lieu prennent la liberté de faire ci-après un état, à MM. de la Commission intermédiaire, des impositions et charges que la communauté paye, pour qu'ils aient égard dans la distribution du degrèvement et des ateliers de charité :
>Taille 773 livres 0 sols 0 deniers - Quartier d'hiver 553 livres 5 sols 0 deniers - Accessoires 138 livres 10 sols 0 deniers - Le seigneur du lieu 665 livres 13 sols 5 deniers - Droit de quittance 2 livres 0 sol 0 denier - Charges locales ou pour les prisons de la ville d'Embrun 509 livres 3 sols 4 deniers - Droit de recette 79 livres 0 sol 0 denier - Vingtième 361 livres 18 sols 0 deniers - Capitation 330 livres 0 sol 0 denier - TOTAL 3,405 livres 9 sols 9 deniers
Certifié par nous, officiers municipaux de ladite communauté de Montgardin, tout ce que dessus véritable.
Fait audit Montgardin, le 10 avril 1789.
Signé: J. RICHARD, consul, J. GACHET, consul, E. MASSE, député