Bédarieux, 15 janvier - Un drame sanglant vient d'attrister la population de Bédarieux.
Le 9 janvier, à une heure du matin, le gendarme Sabiani, tombait mortellement blessé de trois coups de revolver par un contrebandier dangereux qu'il venait d'arrêter en flagrant délit de fraude. Ce forcené reçut à son tour deux coups de revolver tirés par Sabiani et son camarade Rutili.
Vingt-quatre heures après, Sabiani expirait dans d'affreuses douleurs, le contrebandier suivait de près dans la tombe sa victime.
Toute la population de Bédarieux a tenu à honneur d'accompagner le brave Sabiani au Champ du Repos. Plus de trois mille personnes escortaient le convoi. Sur tout son parcours, la population recueillie et navrée formait une haie épaisse; toutes les fenêtres étaient garnies de monde, chacun tenait à montrer, par sa présence, la part douloureuse qu'il ressentait.
La musique municipale a prêté son concours empressé à cette triste cérémonie. Toutes les autorités municipales, administratives et judiciaires assistaient aux funérailles.
Nous ayons remarqué le maire, ceint de son écharpe, M. le commandant de gendarmerie et le capitaine de Montpellier. Le capitaine de Narbonne, parent du défunt, conduisait le deuil. Toutes les brigades de l'arrondissement avaient été conviées. Bon nombre de gendarmes des arrondissements voisins étaient également présents.
La belle société des anciens militaires de Bédarieux, avec son drapeau déployé, ouvrait la marche; elle avait envoyé ses trois draps d'honneur, qui ont été portés: deux par les sous-officièrsde gendarmerie et celui du milieu par les sociétaires eux-mêmes.
Au cimetière, où se trouvait une foule compacte, deux discours ont été prononcés, l'un par le lieutenant commandant l'arrondissement de Bédarieux, qui a retracé, en termes émus, la belle conduite du gendarmé Sabiani; il a fait entendre que cette noble victime avait porté haut le drapeau d'une arme qui est constamment sur pied pour défendre les intérêts sacrés de la société qui lui a donné pour mission d'assurer sa quiétude et son repos; qu'une sublime pensée recommandait à chacun de s'inspirer du dévouement de Sabiani et de le prendre, pour ligne de conduite dans les circonstances analogues. L'autre discours à été prononcé par M. le capitaine Rullet, commandant l'arrondissement de Narbonne.
Avant de couvrir la tombe, le drapeau des anciens militaires a donné le salut d'honneur à ce vaillant soldat, cérémonie des plus émouvantes.
En sortant du cimetière les parents du défunt et tous les officiers de gendarmerie présents se sont rangés pour le salut d'usage.
La musique a ensuite reconduit en corps les parents et les officiers. Toute la ville dé Bédarieux était dans le plus grand recueillement pendant toute la durée de cette triste cérémonie.
LE JOURNAL DE LA GENDARMERIE - 21 janvier 1882⌘ Presse ancienne
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Regorgeant d'anecdotes ou de faits-divers, parfois croustillante, souvent sordide, parfois amusante, elle nous permet de ressentir la manière de pensée de nos aïeux, de ceux qui ont vécu en cette commune, en ce territoire, de ceux qui l'ont fait vivre et que nous visitons.
La presse passée redonne vie aux simples citoyens, à ces gens qui n'auront jamais nom en livres d'histoire.
Il est plaisant d'y voir l'évolution des importances: en 1900, le commissaire fait une enquête pour un vol de jambon.
La violence est importante: violences ménagères ou non sont courantes, violences villageoises, banditisme ou non aussi ; les comptes se règlent à coups de poings, de bâtons ou autres armes.
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