Autrefois, il y a bien longtemps, c'était hier, dans le Maine !
Il y avait, jadis, un abbé si bête, si bête, que tout le monde s'en amusait ; il était connu sous le nom d'Abbé de Laval.
Un certain jour qu'il voyageait dans son carrosse, il passa devant un champ rempli de citrouilles. Immmédiatement, il fit arrêter son cocher:
- Jean, mon ami, dit-il ; qu'est-ce que ces grosses boules jaunes et vertes ?
- Ce sont des œufs de mulet, M. l'abbé, répondit Jean, habitué aux naïvetés de son maître.
- Des œufs de mulet, s'écrie le saint homme ! Comme c'est curieux ; j’ignorais que les mulets pondissent, que je voudrais donc bien en emporter un à l'abbaye !
Le cocher descend complaisamment, cueille la plus grosse citrouille et la dépose dans le carrosse. Un peu plus loin l'abbé rencontre un de ses amis, il s'arrête et le fait monter à côté de lui. L'ami avisant la citrouille, lui demande ce qu'il veut en faire.
- Ah ! mon cher, s'écrie l'abbé ravi, c'est un œuf de mulet, et je rêve d'en avoir un, cela marche l'amble et ne secoue pas son cavalier.
L'ami éclate de rire, le prélat se fâche.
- Allons, dit le premier, mon cher père, je ne veux pas qu'on se gausse de vous, et saisissant la citrouille, il la lance dans une haie qui bordait le chemin. Le hasard veut qu'elle tombe sur un lièvre au gîte qui se met à courir en redressant ses longues oreilles.
- Ah ! quel malheur, s'écrie le pauvre abbé, bougre d'imbécile, l'œuf était couvé, quel joli mulet j'aurais eu !